Le Systema : Qu'est-ce que c'est ?
Expliquer le Systema est une tâche difficile car beaucoup de choses dans cet enseignement passent par le ressenti et ce n’est souvent qu’après l’avoir exercé que l’on comprend, sans comprendre : l’incompréhensible.
Le Systema est un art martial d’origine russe, mais avant tout c’est un art de vivre qui permet de trouver la paix intérieure. S’exercer au Systema, c’est développer la confiance en soi, la détermination, l’intuition et l’optimisme. Adopter les principes du Systema permet de vivre intensément le moment présent et être plus facilement en réussite.
Le Systema n’enseigne aucune technique, mais s’appuie sur des principes. Selon les enseignants et les écoles les principes sont explicités de manières un peu différentes, car il s’agit, en réalité, d’expliquer l’inexplicable. Malheureusement pour les cerveaux trop cartésiens, le Systema ne peut réellement se comprendre que dans le ressenti de la pratique.
Je vais vous donner ma vision actuelle qui pourra certainement d’ailleurs évoluer encore. Pour moi, il y a cinq principes fondamentaux et des outils pour les mettre en œuvre. Les principes s’appliquent en permanence quelle que soit la situation, qu’elle soit martiale ou de la vie quotidienne.
Les cinq principes de base
Tout faire dans un état de décontraction, sans tension musculaire excessive, mais sans être mou.
Il s’agit de trouver le juste équilibre entre le tonus musculaire minimum et le relâchement maximal. Cela apporte l’efficacité de l’action entreprise. C’est assez proche de la notion de non-agir du Tao.
Être connecté à soi, à l’autre, aux autres et à l’environnement.
C’est ce qui permet d’être créatif et juste dans ses actes.
Il y a ensuite trois autres principes. Cependant les deux premiers principes sont, à mon avis, fondamentaux en ce sens que, s’ils sont respectés les trois suivants le sont obligatoirement. Alors que la réciproque n’est pas vraie. On pourrait donc se limiter à énoncer les deux premiers, mais connaître les trois suivants éclaire bien notre lanterne.
Conserver en permanence une structure « verticale »
Même en mouvement, même au sol (Et oui, c’est un des paradoxes à maîtriser). Cela permet d’être solide et affirmé.
Dans la vie courante, je parlerais plus d’alignement. Ce sera de conserver un alignement entre ses pensées, ses actes et ses valeurs.
Être toujours en mouvement de façon continue, fluide, non heurtée, même à l’arrêt.
Encore un paradoxe, à l’arrêt le mouvement est interne. Cela permet d’être indétectable, presque « invisible » à l’adversaire qui quand il vous détecte, pour lui c’est trop tard.
Là encore, dans le quotidien le mouvement sera aussi plus dématérialisé que dans le martial (quoique…). Par exemple, sans rien faire dans une file d’attente, une multitude d’activités sont à notre portée, comme « travailler son systema ». En tout cas, l’impatience ne pourra amener que tension, contraire au premier principe énoncé plus haut.
Avoir le corps unifié.
Quand la main bouge, tout le corps se déplace dans le même mouvement, sinon cela créerait des tensions et le principe de non-tension ne serait pas respecté. Cela demande de développer une conscientisation du corps globale et en même temps partie par partie. Il y a de nouveau une apparente contradiction, mais cela permet d’être rapide et fort.
Dans la vie courante, ce principe s’étend à l’unification de notre corps, de notre pensée et de nos émotions dans une harmonie fidèle à nos valeurs. Si nous n’y prenons pas garde, cette désunification apporte la maladie quand le corps exprime autre chose que ce que le mental veut entendre.
Des outils pour mettre les principes en œuvre
Pour respecter les principes précités, il y a des outils que le Systema propose :
Respirer en permanence est la base de la pratique du Systema.
Il s’agit de respirer en conscience, de manière continue, en inspirant par le nez et en expirant par la bouche. Le rythme s’adapte aux circonstances. En situation normale, l’inspiration est ventrale, médiane et enfin thoracique, mais se stoppe avant que des tensions n’apparaissent dans la poitrine. En mode travail, la respiration s’accélère pour compenser la dépense d’énergie. Sous stress, elle devient explosive pour évacuer les tensions qui apparaissent.
La respiration est l’outil qui permet d’obtenir la verticalité grâce à la mobilisation conscience des chaînes musculaires profondes. Elle permet dans le même temps de respecter le premier principe en relâchant les tensions dans la musculature externe, sujette aux contractions parasites apportées par les émotions inappropriées ou non exprimées.
Dans la vie de tous les jours, une respiration maîtrisée permet de basculer du système nerveux orthosympathique, source de stress, sur le système parasympathique, source de bien être de bonne santé.
Maîtriser ses émotions est essentiel pour respecter les principes.
Mais maîtriser n’est pas contrôler. Il faut réussir à travailler dans le calme intérieur. C’est en apprenant à affronter ses peurs et ses colères que l’on peut agir de façon juste et proportionnée, sans stress dans une situation dangereuse.
Cet outil s’appuie beaucoup sur la respiration qui est un préalable, mais ne suffit pas. En effet respirer permet de retrouver le calme intérieur dans une situation qui nous prend émotionnellement. Cependant, les émotions existent pour être vécues, pas pour être contrôlées. En prendre conscience et savoir comment y répondre fait partie du travail d’une vie.
Rester en pleine conscience de son corps donne aussi une entrée pour respecter les principes du Systema.
En scannant son corps en entier permet d’en piloter chaque partie de manière indépendante et d’être à l’affût de ses tensions pour les dissiper.
Etre présent dans son corps permet bien sûr d’aller vers l’unification, mais cette présence est aussi indispensable pour se connecter aux autres. On retrouve cette notion dans la synchronisation préconisée par la PNL
La mise en pratique
Une multitude d’exercices éducatifs permet de s’approprier les principes grâce à l’utilisation des outils. On peut citer : la marche respiratoire cadencée, les contactés/relâchés, les déplacements primitifs, les massages russes pour libérer les tensions profondes avec les pieds, le travail à l’aveugle pour développer les sensations, ou la gestion du froid ou les apnées prolongées pour se libérer de ses peurs et de ses colères, …
Enfin pour vérifier l’efficacité et la justesse de la pratique, rien de tel que les exercices martiaux à main nue, au bâton, au couteau, avec une chaîne, une corde, un fouet, etc. Comme il n’y a pas de technique, l‘entraînement se réalise à vitesse lente afin que le corps apprenne et mémorise.
Au final
Pour la partie martiale, la maîtrise à vitesse rapide est obtenue par un travail assidu et consciencieux à vitesse lente. A ce niveau de pratique, le corps sait ce qu’il faut faire, car il respecte les cinq principes et le mental a lâché prise.
Dans la vie quotidienne, c’est très semblable. Le lâcher-prise mental limite la production des ondes beta2 du cerveau et favorise le fonctionnement en ondes alpha qui établissent un pont entre conscient et inconscient, permettant ainsi d’être à son maximum cognitif dans un état dit de flow.